PARTENARIAT TRANS PACIFIQUE ET GESTION DE L’OFFRE
Le suspense va durer encore deux jours, peut-être trois. La rencontre d’Atlanta a commencé par des discussions entre équipes de négociation. Ces dernières semaines, c’est-à-dire après le constat d’une impasse à Hawaï, des échanges entre les 12 pays impliqués dans ce projet de Partenariat Trans Pacifique ont permis un rapprochement. On vérifie actuellement entre équipes si on a tous compris les mêmes choses et si les concessions et avancées tiennent toujours.
Si tel est le cas… Et il semble que ce le soit… Les Ministres du Commerce vont tenir une ronde finale et ratifier l’accord.
On parle beaucoup du dossier agricole, mais il y a bien plus dans ce vaste ¨éventuel¨ traité qui couvrira 40% de l’économie de la planète.
Tenons-nous-en au dossier agricole. Oui le Canada pourra vraisemblablement compter sur de nouvelles ouvertures dans la zone Pacifique pour ses viandes, ses grains et d’autres denrées.
Il ne pourra cependant pas penser développer des marchés ¨sans contraintes¨ pour ses produits laitiers ou de volaille… à moins que l’accord implique la disparition pure et simple du système de Gestion de l’Offre.
Les quelques informations lancées ou ¨coulées¨ au cours des derniers jours laissent plutôt croire que l’on va ¨couper une tranche de la Gestion de l’Offre¨. On ne sait pas trop quelle épaisseur aura la tranche … probablement aux environs de 10%…. peut-être un peu moins….
Cela confirme que le gouvernement canadien a choisi une voie lente pour la libéralisation du marché interne. Une étape a été franchie en permettant aux Européens de livrer au Canada 17,700 tonnes supplémentaires de fromages fins. … tout en affirmant que le système de Gestion de l’Offre avait été protégé. Oui… le système est toujours là, mais il faudra aux agriculteurs…. pour respecter le système, c’est-à-dire pour ne pas produire au-delà des besoins internes du Canada, réduire leur production en fonction des volumes supplémentaires arrivant au pays, des volumes qui faisaient partie du quota global que les producteurs laitiers se partageaient. Ils continueront de se partager un quota global… mais un quota diminué.
Deuxième étape de ¨compression¨ du système de Gestion de l’Offre : Le Partenariat Trans Pacifique. Le Canada a un peu ouvert son marché intérieur aux Européens… Il ne peut donc pas ne pas l’ouvrir encore un peu aux pays de la zone pacifique.
Oui, le système de Gestion de l’Offre va subsister. On a protégé la structure… mais l’esprit du système y est de moins en moins. Qui a dit qu’il fallait normalement respecter autant l’esprit que la lettre des règles en vigueur?
L’esprit du système de Gestion de l’Offre était au départ, dans les années 70 et 80… de stabiliser le marché intérieur, d’éviter les fluctuations et d’approvisionnement et de prix.
Les agriculteurs se voyaient donc garantir de pouvoir produire de quoi satisfaire le marché intérieur puisque les frontières étaient bloquées pour des produits laitiers et de volaille.
On a ainsi assuré un développement harmonieux de ces deux secteurs agricoles puisque les fermiers touchaient des revenus couvrant leurs coûts de production et leur assurant une rémunération raisonnable.
On a alors dit que les Canadiens avaient fait un choix de société. On préférait donner un peu de sécurité au monde agricole tout en mettant les consommateurs à l’abri de soubresauts du marché.
Mais le libéralisme a beaucoup été promu au cours des dernières décennies. Les marchés devaient s’ouvrir, les contraintes tarifaires ou règlementaires disparaître. Toutes les négociations commerciales bilatérales ou multilatérales menées depuis 30 ou 40 ans ont peu à peu fait tomber les entraves au commerce.
Aujourd’hui le système de Gestion de l’Offre du Canada est unique au monde. Est-ce une raison suffisante pour le laisser tomber? C’est la grande question que se posent les producteurs laitiers et avicoles.
Tant que le Canada a pu exclure des ententes cette question de la Gestion de l’Offre … ces deux secteurs de l’agriculture ont pu continuer d’en profiter. Mais le Canada disait-on sur la scène internationale parlaient des deux côtés de la bouche. Le Canada réclamait des marchés plus ouverts pour ses viandes et ses grains… entre autres… Mais refusait d’ouvrir son propre territoire aux produits laitiers et de volaille de l’étranger.
Cela n’a fait qu’un temps… et il semble que ce soit bien terminé. Les partenaires commerciaux du Canada exigent maintenant que les marchés canadiens s’ouvrent sinon il ne pourra lui-même profiter d’ouvertures extérieures.
Alors donc, pour l’instant les politiciens fédéraux peuvent continuer de dire que le système de Gestion de l’Offre est protégé… Il continue d’exister… même si on l’amputera encore un peu, selon toute vraisemblance, dans quelques jours.
La suite des choses sera difficile. L’impact sur le secteur agricole canadien, surtout de l’est du pays, sera important. On risque de déstabiliser des milliers de fermes et le secteur de la transformation sera aussi affecté par l’entrée de nouveaux produits étrangers.
Les consommateurs paieront-ils moins cher? Peut-être oui… mais pour combien de temps? Et les emplois perdus seront-ils pris en compte dans l’impact de nouvelles importations? Des questions comme celles-là … Il en surgira beaucoup … très bientôt.
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