
L’arrivée d’André Lamontagne à la tête du MAPAQ
André Lamontagne aura été ministre de l’Agriculture, des pêcheries et de l’alimentation durant sept années consécutives (2018-2025). Un record dépassé par seulement deux autres ministres, soit Jean Garon du Parti Québécois (1976-1985) et Laurent Barré de l’Union Nationale (1944-1960).
J’étais très heureux du changement de gouvernement en 2018 considérant les difficultés que j’avais eues avec le ministre libéral Pierre Paradis, et ses manigances pour affaiblir la mise en marché collective et les plans conjoints de commercialisation des produits agricoles. À la suite des déboires de Pierre Paradis, le ministre Laurent Lessard a pris la relève au MAPAQ. Ensemble, nous avons réglé le dossier du remboursement des taxes foncières en agriculture et surtout lancé la première mouture de la politique bioalimentaire. Laurent a joué un rôle déterminant dans la dernière année du gouvernement Couillard à titre de ministre de l’Agriculture.
Un nouveau gouvernement, un nouveau ministre, André Lamontagne arrive à l’agriculture. Cette nomination était une surprise pour moi et pour lui aussi je crois. Nous nous sommes croisés une première fois après sa nomination au conseil des ministres, lors de la réception qui a suivi. Une brève rencontre pour le féliciter de sa nomination et faire connaissance. Nous avions convenu de nous rencontrer une fois son cabinet complété, le temps qu’il prenne connaissance des différents dossiers.
Avec le temps nous avons établi une bonne relation. J’ai connu plus de 10 ministres de l’agriculture de 2001 à 2021. Chacun est différent, bien sûr, mais ce qui les distinguent le plus c’est l’influence et le respect qu’ils ont au sein du cabinet des ministres et auprès du premier ministre. Dans notre système parlementaire, tout se joue au bureau du premier ministre et du conseil exécutif. Si le ministre a l’oreille du PM, ça aide! André Lamontagne était respecté par ses collègues et un allié de la première heure de François Legault. Est-ce que cette proximité a été profitable au secteur agricole? Sans doute, mais pas autant que souhaité selon moi.
Ses débuts furent marqués par le dossier du lanceur d’alerte Louis Robert. C’est à ce moment que les médias et le grand public font sa connaissance. Dans ce dossier, il n’avait pas à prendre toute la chaleur. Il a choisi de protéger son monde. André Lamontagne est un gars d’équipe. En équipe avec son gouvernement et en équipe avec son ministère. Au fil des ans, il s’est entouré des personnes en qui il avait confiance. Ce noyau, assez conservateur, est devenu passablement hermétique.
La politique bioalimentaire du Québec et la CPTAQ
La première décision importante du ministre Lamontagne a été de poursuivre le travail de Laurent Lessard en maintenant la politique bioalimentaire. Ce geste est significatif. André Lamontagne est un homme capable de s’élever au-dessus de la partisanerie et de la politique. Durant les sept années de son mandat à l’agriculture, il a obtenu la collaboration des partis d’opposition sur les projets de loi qu’il a défendus et il a toujours eu le respect de ses pairs.
La poursuite des travaux sur la politique bioalimentaire et le lancement de la dernière mouture le 22 août dernier, sera l’élément que l’on retiendra du passage du ministre Lamontagne à l’agriculture. Cette politique a le pouvoir de rassembler tous les acteurs du secteur bioalimentaire. C’est un outil unique au Canada. Du producteur à la table des chefs, ou de la cuisine, elle aborde tous les enjeux de l’alimentation des québécois avec des cibles ambitieuses à atteindre. Cependant, les gestes concrets du gouvernement en appui à la politique ont été plutôt timides. La demande alimentaire mondiale est en croissance, le Québec peut et doit miser sur ce secteur.
Tous les ministres de l’agriculture que j’ai côtoyés avant André Lamontagne trouvaient la loi de protection du territoire agricole trop rigide et cherchaient des assouplissements pour accommoder les municipalités. La cohabitation entre les différentes activités sur le territoire agricole sera toujours un enjeu, mais nous avons besoin d’un ministre de l’Agriculture qui assume son rôle de gardien de la loi de protection des terres agricoles, rôle qu’André Lamontagne a pleinement assumé.
La signature d’André Lamontagne pour le secteur bioalimentaire
Sur la scène nationale, il a été un pilier ayant survécu à tous ses homologues. Son influence a été importante dans le dossier du guide des bonnes pratiques entre les détaillants alimentaires et les fournisseurs. On le sait, le dédoublement des compétences fédérales et provinciales en agriculture est lourd. Certaines provinces, dont le Québec, sont beaucoup plus autonomes que d’autres. C’est la réalité canadienne et les provinces font rarement consensus sur les réformes nécessaires, ce qui donne une grande latitude au gouvernement fédéral.
Somme toute, André Lamontagne aura été un bon ministre de l’Agriculture. J’ajouterai qu’il a été un excellent communicateur pour le secteur bioalimentaire. Il a prôné plus d’autonomie alimentaire pour le Québec. Il a été présent auprès du secteur de la transformation alimentaire, au grand plaisir des transformateurs.
Alors que j’étais président de l’UPA, mon principal regret aura été de ne pas avoir réussi à le convaincre de la nécessité de revoir les programmes de gestion des risques en agriculture. Les programmes mur à mur au Québec, tels qu’ils existent maintenant, ne fonctionnent pas pour les régions et les entreprises en démarrage.
Un chantier pour le prochain ministre?
André, merci pour toutes ces années d’engagement public, dont sept à la tête du ministère de l’Agriculture. Tu auras plus de temps avec les tiens et peut être aussi, le temps pour une ronde de golf?
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