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LES YEUX SUR ATLANTA

Peut-être est-on à quelques heures de l’annonce d’une entente de Partenariat Trans Pacifique!

Les échos d’Atlanta, jusqu’à maintenant laissent croire que les négociations vont bien, que l’on progresse. En même temps, ce calme apparent est inquiétant pour les tenants de la Gestion de l’Offre.

D’ailleurs il y a lieu de s’inquiéter car les membres du gouvernement conservateur canadien , le Premier Ministre Stephen Harper en tête, ont soigneusement évité ces derniers jours et encore ces dernières heures, d’ajouter le mot ¨intégralement¨ lorsqu’ils disait continuer de protéger la Gestion de l’Offre.

Comme je le disais dans un texte précédent, ¨protéger la Gestion de l’Offre¨ peut fort bien signifier le maintien d’une structure régulant la production laitière canadienne. Mais, cette structure pourrait devoir gérer moins de lait canadien, si des produits laitiers étrangers entrent plus abondamment au pays.

La Gestion de l’Offre n’est certes pas parfaite mais elle a eu au cours des quelques 40 dernières années un effet rassurant sur les secteurs laitier, des œufs et de la volaille.

Ceux qui prônent l’abolition de la Gestion de l’Offre estiment justement que le système a été trop rassurant, qu’il a nui à l’innovation, qu’il n’a pas permis de développer véritablement la fibre entrepreneuriale de nos agriculteurs et que ceux-ci se sont enlisés dans un confort qui ne les a pas amené à viser davantage de compétitivité. Parlez-en aux producteurs laitiers de Nouvelle-Zélande où on a aboli les systèmes de quotas et aux agriculteurs européens où plus récemment on les a contraint à fonctionner sous la formule des contrats avec des entreprises de transformation. En Nouvelle Zélande les prix à la ferme ont chuté et les prix au détail fluctuent, plus souvent qu’autrement au-delà de ce qu’ils étaient alors qu’il y avait le contrôle de la production. En Europe, les revenus des fermiers chutent et les marchés sont perturbés.

S’il y a du vrai dans les énoncés des opposants à la Gestion de l’Offre, il y a aussi absence de certains éléments de contexte. Immanquablement la compétitivité demande de grossir les entreprises d’avoir des fermes plus imposantes. C’est ce qui s’est passé depuis le dernier demi-siècle. Au-delà de 80% des fermes laitières sont disparues. En fait leur production a été intégrée et regroupée . Une ferme laitière d’aujourd’hui produit probablement celle de 20 fermes d’il y a 50 ans, sinon davantage.

Si on ampute la Gestion de l’Offre, on va accélérer ce mouvement vers de grosses fermes.

Déjà on s’est rendu compte qu’il devient difficile, dans la situation actuelle, de continuer à défendre la ferme familiale et d’y assurer la relève. Avec un marché libéralisé ou à tout le moins avec une production laitière confrontée à une plus forte concurrence, la rentabilité sera plus difficile à atteindre dans des entreprises de taille moyenne ou petite. Donc encore une contrainte au maintien des fermes familiales… Encore là ferme familiale ne veut plus dire grand-chose parce que des familles possèdent des fermes de plusieurs centaines de vaches. Souvent on dira de ces entreprises qu’elles sont ¨financiarisées¨ , qu’il s’agit de ¨placements¨ dans l’activité agricole et donc que la perspective d’avenir ne se situe pas au même niveau que pour les plus petites fermes

Bon, on pourrait en débattre longtemps… Mais passons à d’autres considérations. Quels contrôles de qualité ou sanitaires garantiront que les produits laitiers (ou de volaille) qui entreraient au Canada … en vertu du Partenariat Trans Pacifique seraient équivalents à ceux auxquels sont soumis ce qui est produit au pays?

Déjà depuis longtemps les producteurs laitiers et les fromagers le disent, par exemple à propos des fromages européens livrés ici ou à être bientôt placés dans les comptoirs de nos commerces :   les normes sanitaires et de fabrications ne sont pas les mêmes. L’Europe est beaucoup plus tolérante.

Et si on regarde du côté américain…. Les producteurs laitiers y utilisent la somatotrophine, une hormone de croissance stimulant la production du lait.   Ici la somatotrophine est interdite . Va-t-on tout de même laisser entrer sur notre marché les produits laitiers américains… ou encore une fois abaisser nos normes pour établir une parité avec les États-Unis.

Alors donc…. On attend du mouvement à Atlanta.

Si un accord se confirme…. Il faut vraiment s’attendre à une attrition quelconque à la Gestion de l’Offre.

Et si tel est le cas…. Ce qu’il faudra surveiller pour la suite des choses est l’attitude que prendront ceux et celles, chez nos politiciens, qui ont dit qu’ils refuseraient d’appuyer le Partenariat Trans Pacifique … et donc qu’ils refuseraient de la ratifier… s’il ne maintient pas ¨intégralement¨ la Gestion de l’Offre.

 

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Un commentaire

  1. Aucun doute qu’une gestion de l’offre est une protection contre le dumping des produits alimentaires étrangers, souvent hautement subventionnés et moins réglementés côté sanitaire. Mais la formule actuelle, (gérée par les fédérations de l,UPA, avec des quotas spéculatifs et un refus de faire une place décente intra ou hors quotas aux productions de créneau et de proximité) contribue elle aussi à favoriser un club fermé de gros producteurs. Quant à l’incapacité de nos fermes à compétitionner sans la gestion de l,offre, une question dont personne ne parle: les producteurs n’auraient tout de même plus à payer les sommes astronomiques pour les quotas qui comptent souvent pour la moitié des investissements de la ferme: est ce que les quotas représentaient des investissements aussi considérables en Nouvelle-Zélande et en Europ quand on les a supprimés.

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